Le terroriste Mohamed Ali Ag Wadossène dont la mort a été annoncée par la force Barkhane en début juillet 2015, vient être jugé par la cour d’assises de Bamako le jeudi dernier. Accusé de terrorisme, d’enlèvement de personnes, de séquestration, prise d’otages et association de malfaiteurs, Wadaossène a été condamné par contumace à la prison à vie.
Selon certains observateurs, « la libération de Wadossène par les autorités maliennes est une décision politique et n’empêche en rien la justice de faire son travail ».
Me Amadou Tiéoulé Diarra est avocat au Barreau malien. Il a été joint par Ayouba Sow :
« La nouvelle de sa mort qui a été diffusée n’est pas avérée. Parce que la cour d’assises n’a pas eu la preuve tangible qu’il a été effectivement tué. C’est ce qui fait que n’ayant pas cette preuve, la cour d’assises l’a condamné par contumace. On se demande quels sont les effets de ce jugement. Il faut comprendre qu’avant l’expiration de sa peine, avant la prescription, si on arrivait à mettre la main sur lui, il va purger sa peine en prison ».
Après son arrestation, il avait été échangé contre l’otage français Serge Lazarevic par les autorités maliennes. Est-ce que ce jugement n’est pas politique ?
« Tout le débat est là. Est-ce que libéré suppose que les infractions qui ont été commises sont absoutes ? La question est là. Parce que la libération n’est certainement pas le pardon. Seule la justice peut effectivement ordonner de ne pas le poursuivre. La libération est politique mais la justice joue son rôle de troisième pouvoir ».
Le bureau d’Amnesty international Mali estime que la sentence contre Wadossène n’a aucune valeur étant donné qu’il est annoncé mort par Barkhane depuis juillet 2015. Selon le directeur exécutif d’Amnesty international Mali, « le pouvoir judiciaire aurait dû juger les véritables criminels écroués en prison au lieu de perdre leur temps sur l’affaire Wadossène ».
Saloum Traoré est le directeur exécutif d’Amnesty international Mali. Il est joint au téléphone par Ayouba Sow :
« Nous avons tous appris ensemble que la force Barkhane est venue à bout de Wadossène. Je suis vraiment étonné qu’on puisse perdre tout ce temps à faire tout un procès pour le condamner à perpétuité, alors qu’il est déjà décédé ».
Est-ce qu’on peut croire à la mort de Wadossène annoncée par l’opération Barkhane ?
« Je ne vois rien qui nous empêche de croire à ça, puisque dans tous les cas, ils n’ont pas l’habitude de nous faire des fausses déclarations. Le fait qu’il soit politiquement libéré par le gouvernement ne le dispense pas des poursuites judiciaires, parce que nous sommes normalement dans un état de droit où il y a une séparation nette entre l’exécutif et le judiciaire. Il peut donc être provisoirement libéré pour faire place à une négociation, mais cela ne veut pas pour autant dire que l’affaire est classée au niveau de la justice ».
Cette sentence de la cour d’assises a-t-elle de la valeur pour vous ?
« Pour moi ça n’a pas de valeur. On aurait dû utiliser tout ce temps pour juger les vrais criminels qui sont en prison ».
Les responsables des groupes armés joints par notre rédaction n’ont pas voulu s’exprimer sur la décision de la cour d’assises, car ils estiment que « cette affaire n’a rien de commun avec ni les groupes armés ni le processus de paix ». Selon eux « Mohamed Ali Ag Wadossène est jugé comme n’importe quel citoyen Malien ».