Le gouvernement a adopté en Conseil des ministres extraordinaire le projet de loi relatif à une modification de la constitution du pays. Le projet doit être débattu à l’Assemblée nationale. Il prévoit la création d’un parlement à deux chambres, l’Assemblée nationale et un Sénat. Le gouvernement précise par contre que les clauses de l’accord de paix d’Alger ont été prises en compte dans le projet de loi. Aucune date n’est encore avancée pour la ténue de cette révision constitutionnelle.
Dans le projet de loi, le Sénat dévient la 4e institution de la République alors que la Haute Cour de justice, elle, ne figure plus parmi les institutions du pays. Cependant, elle demeure tout de même compétente pour juger le président de la République et les ministres mis en accusation devant elle par le Parlement ainsi que leurs complices. Aussi, le Haut Conseil des collectivités sera supprimé et la Cour des comptes sera instituée.
Autre nouveauté, « le projet de loi institue une procédure de révision constitutionnelle par voie du Parlement réuni en congrès sur la saisine du président de la République. » Jusqu’à présent, les révisions constitutionnelles n’étaient possibles que par voie référendaire. Dans le texte adopté par le Conseil des ministres, la Cour constitutionnelle devient la 5ème institution et reçoit désormais le serment du Président de la République. Un attribut qui était dévolu à la Cour suprême. Selon le gouvernement, le texte prend aussi en compte les clauses de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation issu du processus d’Alger.
Toutefois, le projet de loi n’entraîne pas un changement de République, ne remet pas non plus en cause la durée et le nombre du mandat présidentiel. Dans son communiqué, le gouvernement justifie cette révision constitutionnelle par le souci de corriger ‘’des lacunes et des insuffisances’’ de la Constitution de 1992. L’autre raison invoquée par le gouvernement, c’est celle liée à la situation de crise que vit le pays qui a révélé la fragilité des institutions.
Certains observateurs s’interrogent sur l’opportunité de cette révision constitutionnelle compte tenu de l’état de fragilité du pays. Pire, ces analystes estiment qu’une révision constitutionnelle dans le contexte actuel viole l’article 118 de la constitution qui interdit toute révision de la loi fondamentale alors que l’intégrité du pays est menacée.
Maître Abdrahamane Ben Mamata Touré, est avocat. Il est joint par Sékou Gadjigo
« L’introduction de cette seconde chambre par substitution au Haut conseil des collectivités ne me parait pas être quelques choses de fondamentalement mauvais. Parce que les observations qui ont été faites initialement étaient relatives au coup simplement de la superposition de beaucoup d’institutions. Par contre, le communiqué est assez évasif sur la question de la prise en compte des dispositions de l’accord. Nous ne savons pas aujourd’hui quelles sont les dispositions de l’accord qui ont été prises en compte par ce projet. Au-delà même de cette prise en compte des clauses de l’accord issu du processus d’Alger, la question de l’opportunité reste de mise. Lorsqu’on veut faire une nouvelle constitution pour aller vers une gouvernance beaucoup plus pertinente, on ne peut pas commencer à violer la constitution déjà existante. Notamment l’article 118 qui dit que l’initiative même ne serait pas possible lorsque l’intégrité du territoire national est sérieusement est menacée, ce qui est le cas actuellement ».