Sur les sites des déplacés internes, le quotidien des orphelins est douloureux
Site de déplacés de Senou, 11 février 2025

Sur les sites des déplacés internes, le quotidien des orphelins est douloureux

Selon le ministère de la Santé et du Développement social, au moins 330 000 personnes se sont déplacées en mai 2024 à travers le Mali. Parmi elles, 292 dont 127 filles sont des orphelins qui paient le lourd tribut de ces conflits. Qui pour aider ces enfants terrifiés par les conflits ? Quelles politiques l’État a mis en place pour ces enfants, victimes ?

Marchant difficilement sous sa tente, ce jour Aïcha Barry, grand-mère de deux enfants orphelins ne se sent pas bien. Malgré son âge avancé, elle se débrouille tant bien que mal à prendre soin de ses petits enfants qui sont désormais à sa charge. Âgés de 5 ans et 4 ans, ces enfants sont orphelins de père et de mère.

« Je m’occupe d’eux depuis le décès de leurs parents. Je les nourris, les habille, s’ils tombent malade aussi je les soigne. Et c’est ainsi depuis trois ans. Le plus âgé a d’ailleurs commencé à fréquenter l’école. Dieu merci, on reçoit aussi de l’aide de la communauté. » nous confie-t-elle.

Abdoulaye Barry est aussi dans la même situation. Il a perdu sa femme à Ogossagou, région de Bandiagara. Ses enfants sont encore petits et il doit jouer le rôle des deux parents. Une tâche assez ardue pour lui, dit-il.

« Je vis avec mes enfants orphelins sur le site, depuis de le décès de leur maman, suite aux conflits à Ogossagou. Depuis 2019, je suis seul à m’occuper de ces enfants. Leur prise en charge n’est pas facile, mais avec les aides, j’arrive à m’en sortir ».

Des aides multiformes, mais insuffisantes

« Nous avons une quarantaine d’enfants orphelins sur notre site et on a des difficultés par rapport à leur prise en charge ». C’est ce que souligne Oumar Dicko, président du comité de gestion du site des déplacés de Senou-Bamako. Ce responsable explique que ces enfants orphelins bénéficient d’un hébergement, mais la difficulté se situe au niveau des soins sanitaires.

« Il y a certains qui sont chez des parents éloignés, d’autres sont avec des voisins. Bien vrai que nous avons de l’aide, mais ce n’est pas suffisant. Lorsqu’ils sont souffrants, nous avons toutes les peines du monde pour les faire soigner. Pour leur scolarité, nous avons moins de problèmes, parce qu’on a une école ici. Il n’y a pas d’ONG qui est là spécifiquement pour ces enfants. » explique-t-il.

À Macina, dans la région de Ségou, sur le site des déplacés, Moussa Diarra, responsable du site, souligne que les enfants dans cette situation particulière bénéficient de l’aide d’ONGs même si c’est rare.

« Les enfants qui vivent sur le site, dont les parents sont décédés ; c’est l’affaire de tous ici. Tout le monde s’occupe d’eux, même chez moi il y en a. Récemment, il y a même une ONG qui leur a offert des habits, des sacs et même des animaux ».

Pas de réponses spécifiques pour les orphelins déplacés

« Le service de développement social de Mopti, a enregistré plus de 39 680 enfants déplacés à la date du 31 janvier 2015. Parmi ces enfants, environ 292 dont 127 filles, sont des orphelins.

Il y a un seul partenaire avec nous, qui a fait la prise en charge de ces enfants-là, c’est ASSEF (Appui, conseil aux enfants et aux femmes du Mali). Donc ils ont fait une première prise en charge, ils sont là pour la deuxième », explique Mamadou B Keïta du service de développement social.

Au regard des différentes interventions, le cas des enfants orphelins ne mobilise pas suffisamment d’organisations humanitaires, compte tenu des défis rencontrés par ces organismes. Mais ils précisent que ces enfants ne sont pas discriminés et bénéficient de la même prise en charge que les autres couches défavorisées.

 « Nous ne faisons pas de discrimination. Qu’ils soient orphelins ou pas, tous les enfants déplacés sont dans le besoin. Nous ciblons les enfants qui ont des besoins sur le plan sanitaire, les enfants qui doivent aller à l’école, ou les enfants qui sont en situation de handicap, qui ont besoin d’une protection spéciale. Nous leur apportons une aide concrète, l’inscription et le suivi à l’école, leur prise en charge sur le plan médical. On s’occupe même souvent de leur alimentation », nous confirme Bréhima Ballo, le responsable des programmes du projet Amsode (Association Malienne pour la Solidarité et le Développement).

Aujourd’hui, la situation de ces enfants est problématique. Les responsables de sites lancent un appel urgent à l’Etat ainsi que les bonnes volontés pour une meilleure prise en charge. Ces enfants orphelins, selon eux, sont déjà vulnérables et si toutes les conditions ne sont pas réunies, il sera difficile de leur assurer un avenir meilleur.

Ecoutez l’ intégralité de l’émission Fabu dirène: