Le crash de l’avion d’Air Algérie au Mali en juillet, qui avait fait 116 morts, reste inexpliqué: l’enquête n’a pas permis pour l’instant de retenir une « piste privilégiée». « C’est la conclusion du rapport d’enquête d’étape présenté hier à Bamako».
« Rien ne peut confirmer ou infirmer la piste terroriste », « pour l’instant, il n’y a pas de piste privilégiée », a indiqué Bernard Boudaille, du Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) français.
Le représentant du BEA français et le président de la Commission d’enquête du Mali, N’Faly Cissé, ont souligné que l’équipage n’était pas fatigué, qu’il était expérimenté et préparé à des conditions météorologiques difficiles.
Les systèmes de pilotage automatique de l’avion avaient été déconnectés, a souligné l’expert français. Mais il a précisé qu’il n’était pas « possible de dire si cette déconnection a « résulté d’un automatisme de l’avion ou d’une manœuvre volontaire ou involontaire de l’équipage ».
L’enregistreur des conversations dans le cockpit ne fonctionnait pas normalement et « ne permet pas de comprendre les messages » échangés par l’équipage, a ajouté l’expert.
L’enregistreur des données de vol fonctionnait en revanche, et montre que l’appareil a été victime d’une « chute brutale » après un « ralentissement de ses moteurs » à son altitude de croisière Selon lui, les conditions méteo au moment du crash « peuvent être considérées comme normales ».
L’avion a « fait des évitements » pour contourner « des nuages susceptibles d’engendrer des turbulences sévères et le givrage de l’appareil ». Mais l’enregistreur de vol « montre qu’il n’y a pas eu de turbulences » avant le décrochage de l’appareil, et « il n’y a pour l’instant rien qui puisse infirmer ou confirmer l’hypothèse d’un givrage » qui aurait provoqué l’accident, a-t-il ajouté
A l’écoute de ces conclusions les familles des victimes du Burkina Faso ont exprimé leur déception . « Nous sommes restés sur notre faim, même si ce n’est qu’un rapport d’étape », a déclaré l’un de ses membres.
Pour Mamadou Diallo, frère de la seule victime malienne du drame « ce rapport ne prend pas en compte les préoccupations des familles qui est de savoir les véritables causes du crash ». Selon lui les proches des victimes sont restées sur leur faim, car le document ne donne que des détails techniques. Il a été joint par Sékou Gadjigo :
« Ce que je pense de ce premier rapport, c’est qu’il y a eu une nouvelle information. Mais il se trouve que cette information ne prend pas en compte nos préoccupations qui sont de savoir véritablement les causes réelles du crash. Nous étions partis dans l’intention de savoir ce qui a conduit au crash. Mais nous sommes restés sur notre faim puisque c’est des détails techniques qui nous ont été donnés sur la trajectoire suivie par le vol jusqu’au crash. Nous attendons une meilleure diligence de ce dossier pour connaître la vérité. C’est tout ce qu’on veut ».
Le 7 août, le BEA, chargé par les autorités maliennes de mener l’enquête technique, avait indiqué que l’avion, un McDonnell Douglas MD-83, avait été pulvérisé à son impact au sol après avoir perdu de la vitesse et viré à gauche pour une raison indéterminée alors qu’il traversait une zone orageuse.
« Quand on voit la trajectoire, cela conduit à penser que l’avion ne s’est pas désintégré en plusieurs morceaux en vol » avait déclaré le directeur du BEA, Rémi Jouty.
« Je ne pense pas que l’on puisse à ce stade exclure la thèse d’une action délibérée, mais on ne peut pas en dire plus pour l’instant », avait-il ajouté.
Le BEA mène une enquête technique dont le but est d’améliorer la sécurité aérienne. Les responsabilités pénales sont du ressort de la justice: trois enquêtes ont été ouvertes, au Mali, en France et au Burkina Faso.
Pendant une semaine, les experts internationaux avaient ratissé le site, proche de la ville de Gossi, à environ 150 kilomètres de Gao, pour collecter notamment les restes humains à des fins d’identification des victimes, une tâche difficile en raison de la pulvérisation de l’appareil. Ils avaient procédé à environ 1.000 prélèvements d’ADN.
L’accident du vol d’Air Algérie était le troisième en seulement huit jours, concluant une semaine noire pour l’aviation après le crash d’un avion de Malaysia Airlines dans l’est de l’Ukraine et celui d’un avion de la compagnie taïwanaise TransAsia sur une île au large de Taïwan.