L’armée malienne sera bientôt présente à Kidal selon la CMA. Pour ses responsables « des discussions sont en cours pour faciliter ce retour ». La question fait débat chez les observateurs, dont certains mettent en cause la bonne foi de la CMA sur un retour effectif.
L’annonce du retour de l’armée à Kidal est une des dispositions de l’accord d’Alger. Elle intervient alors que le week-end dernier la CMA et la Plate-forme sont parvenus à un consensus autour de la présence des combattants du Gatia à Kidal. Les discussions devraient permettre de faire redescendre l’atmosphère devenue électrique avec l’arrivée la semaine dernière des combattants du Gatia dans la ville. Pour certains responsables des groupes armés, cet accord est « une avancée dans le processus de retour de l’armée à Kidal ».
Mouhamed Ousmane Ag Mouhamedoun est membre de la CMA. Il était invité à notre émission « Grand Dialogue » d’hier :
« Avec ce qui est arrivé à Kidal, c’est déjà une avancée par rapport à l’arrivée de l’armée et de l’administration à Kidal. C’est une avancée car il faut comprendre que les régions n’ont pas la même réalité. Tombouctou n’est pas comme Gao, tout comme Gao n’est pas comme Kidal. Chacune a sa réalité. Aujourd’hui avec ce qui est arrivé, Kidal s’est hissé à un niveau où il n’était pas il y a quelques temps. C’est un niveau où d’autres régions sont déjà. Donc, c’est une avancée. Le retour de l’armée malienne c’est l’accord qu’on est en train de mettre en œuvre. Il y a des mécanismes qui sont prévus par l’accord. Il y a un retour progressif qui est prévu par l’accord. C’est dans le cadre de la concertation, de la consultation entre les parties, c’est-à-dire la Plateforme, la CMA et le gouvernement, que cela doit arriver. Que ça soit au niveau de la CMA ou au niveau de la Plateforme ou du gouvernement, je ne pense pas qu’il y a une seule partie qui soit hostile à ce que ce débat s’engage; que la nouvelle armée réformée et reconstituée revienne à Kidal. Parce que c’est ce que dit l’accord. Cela est extrêmement important. Je pense que tout le monde veut aller vers cela. Et, tout le monde est pressé d’y aller pour que la quiétude revienne. Pour que nos populations retrouvent le sourire ».
Si le fil des échanges entre les groupes armés du nord a pu résister aux dernières tensions sur la présence des combattants du Gatia, l’Etat lui est resté silencieux. Le gouvernement assure toutefois, que « les accords entre les groupes armés sont un pas important vers le processus de mise en œuvre de l’accord d’Alger et constituent une chance pour le retour de l’armée à Kidal ».
Ibrahim Assihanga est conseiller technique au ministère de la réconciliation nationale. Il était également l’un des invités de notre émission « Grand Dialogue » d’hier :
« Nous apprécions positivement ce qui s’est passé. D’ailleurs, c’était notre vœu. Toute portion de terre appartient à tous les Maliens. Et si un Malien peut aller partout où il a sa famille, ceci est une bonne nouvelle. Il est quand même normal que ces familles puissent se côtoyer, se joindre. Il est normal aussi qu’aujourd’hui qu’il y ait cette cohésion sociale. On a accusé le gouvernement de n’avoir rien dit. Mais en fait si le gouvernement et la communauté internationale n’ont rien dit, c’est qu’on sent qu’il y avait la bonne foi de manière à ce que ces communautés puissent vivre ensemble. L’article 50 de l’accord le précise bien. Je crois que ceci est une action menant à la cohésion sociale, au bien vivre ensemble de manière à ce que les populations retrouvent leur mode de vie. Nous ne faisons qu’encourager cela. Et c’est ça notre devoir aujourd’hui en tant qu’État. Il y a des dispositions qui sont prises au niveau de l’accord. Ce sont ces dispositions que nous sommes en train de mettre en œuvre. Dès que ces dispositions seront mises en œuvre, il n’y aura aucun problème à ce que l’armée aille à Kidal ».
La question du retour de l’armée à Kidal fait débat. La bonne foi de la CMA est mise en doute par certains. Pour beaucoup, le gouvernement a négligé son rôle moteur dans la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation. Pour des analystes, le gouvernement doit profiter de l’accord d’Anefis pour booster le processus de retour des Famas à Kidal.
Alexis Kalambiri est éditorialiste au quotidien « Les Echos ». Il est joint au téléphone par Ayouba Sow :
« Je pense qu’à ce stade les choses ne sont pas claires, et on ne sent pas trop de sincérité. C’est le gouvernement qui devait impulser le mouvement. Car, à la signature des accords tout était clair. C’est le gouvernement qui doit conduire le processus de paix. Mais depuis la signature nous n’avons pas bougé, le gouvernement n’a rien fait. Les autres ont été obligés de prendre des initiatives. Donc, franchement on ne peut pas leur en vouloir. Parce qu’ effectivement on ne peut pas rester dans le statu quo. Si vous voyez le communiqué conjoint, à la limite ils parlent de partage de rôle et de pouvoir à Kidal. Donc, s’ils sont d’accord que l’armée retourne, on ne peut que les prendre au mot. Nous avons actuellement une armée assez outillée pour jouer son rôle. Elle le démontre actuellement au quotidien. On ne peut que se réjouir de cet aspect. Je suis sûr que l’état-major est en train d’analyser les faits et de prendre ses responsabilités. Que le gouvernement fasse ce qui est attendu de lui, c’est tout. Pour cela les mécanismes existent aujourd’hui dans le cadre de l’accord que nous avons signé ».