L’état d’urgence décrété le 20 juillet dernier après l’attaque de Nampala pour une durée de 10 jours a été prorogé par l’Assemblée nationale à la demande du gouvernement pour une durée de 8 mois, soit jusqu’au 29 mars 2017. L’Assemblée nationale réunie en session extraordinaire a voté le projet de loi à l’unanimité. Une commission consultative de contrôle de l’état d’urgence a aussi été mise en place afin d’éviter les abus de pouvoir.
Abdoulaye Idrissa Maïga, ministre de l’administration territoriale explique aux élus de la nation le rôle de ladite commission :
« Je voulais rassurer que l’état d’urgence contribue à la stabilité du pays, à préserver l’ordre public, à préserver la sécurité de nous tous. Quand il y a des abus, nous serons les premiers à les combattre, c’est pourquoi nous avons accepté que tout cela se fasse sous le contrôle de cette commission. Nous sommes en train de relire les textes, renforcer les moyens, clarifier ce qui ne l’était pas, relever les insuffisances à l’effet de les corriger. Voilà le travail en cours. Dans ces discussions, je pense qu’on se donnera tous les moyens. Donc, honorables, je souhaiterais que vous acceptiez de proroger l’état d’urgence jusqu’au 29 mars dans l’intérêt, bien compris, de nos populations ».
Les députés de l’opposition disent avoir voté ce projet de loi afin d’aider le gouvernement à prendre des mesures spéciales d’intervention pour éviter des attaques, même si l’état d’urgence restreint certaines libertés des citoyens. Ils affirment être aux côtés du gouvernement pour voter toute loi s’inscrivant dans le cadre du renforcement de la sécurité et le retour de la paix au Mali. L’opposition approuve aussi la commission arbitraire mise en place pour éviter les abus de pouvoir pendant l’état d’urgence.
Alkaïdy Touré est député URD élu à Diré. Il a été joint au téléphone par Ayouba Sow :
« L’état d’urgence est instauré parce qu’il y a un problème de tranquillité. Vous avez vu ce qui s’est passé à Nampala, il faudrait qu’on prenne des dispositions pour qu’on puisse intervenir. Parce que, quand on reste dans le classique, ce n’est pas facile de mobiliser. Et donc, c’est pour la capacité de mobiliser et de sécuriser. Dans tous les cas, ça va jouer sur la liberté des gens, mais je crois qu’avec la commission qui est mise en place, on pourra faire de sorte qu’on puisse canaliser tous les cas d’abus qui pourraient s’opérer. Parce que c’est ça, les gens ont peur de l’état d’urgence parce que ça apporte une restriction aux libertés individuelles, des mouvements, des rassemblements. Nous sommes donc d’accord avec l’état d’urgence et nous sommes d’accord avec toutes les lois qui peuvent arranger la paix ».
L’état d’urgence a été instauré plusieurs fois, depuis novembre dernier, malgré tout, les attaques persistent. Est-ce que cette mesure a finalement un impact sécuritaire ?
« L’impact de la mesure, c’est par rapport à l’intervention, ce n’est pas du tout empêcher. La mesure ne peut pas empêcher qu’il ait des violences, non ! L’objectif, c’est d’éviter qu’il ait beaucoup d’abus. Par exemple si vous avez prévu une réunion qui devrait se tenir et que les forces de sécurité ont eu écho que la réunion sera attaquée, ils retirent immédiatement l’autorisation ».
Selon certains analystes, la prorogation de cette mesure d’exception est une nécessité, car selon eux, les précédentes ont atteint des effets escomptés.
Souleymane Dé, chargé de cours à la faculté de droit public de l’Université de Bamako est joint au téléphone par Ibrahima Diallo :
« L’Etat est fondé en droit pour des mesures de sécurité publique et surtout de sûreté nationale. C’est fait dans le but de tirer les leçons de ce qui s’est passé, ce qu’on a vécu dans les précédentes prorogations et maintenant, il y a suffisamment d’alertes, suffisamment d’indicateurs qui aujourd’hui mettent tout le monde à l’épreuve et qui, forcement, vont faire changer les choses ».
Pensez-vous qu’il y a un lien entre la suspension récemment de l’état d’urgence et les différentes attaques que le Mali a connu notamment dans les régions du nord et celles du centre ?
« Je ne pense pas que ça soit l’état d’urgence qui soit en faute ou en cause. Les services de renseignements sur le terrain doivent être opérationnels tous les jours ; qu’on soit en période d’état d’urgence ou n’importe quelle autre période, ça c’est l’esprit des services de renseignements. Ça c’est un travail de terrain qui doit être étoffé, réorganisé afin de permettre à tous les niveaux que les décisions de commandement puissent avoir la même information et puissent réagir avec efficacité ».