Des exactions pouvant être qualifiées de « crimes de guerre » auraient été commises en mai 2014 et en mai 2015, dans le Nord du Mali, par les groupes armés et les forces de sécurité et de défense maliennes, selon deux rapports des Nations unies publiés en décembre.
Les groupes armés mis en cause rejettent ces accusations.
L’ONU publie ces rapports alors que le gouvernement malien et les mouvements armés, proches ou opposés au pouvoir de Bamako, peinent à avancer sur le chemin de la mise en application de l’accord de paix, signé définitivement en juin dernier.
Publiés conjointement par la MINUSMA et le Haut-Commissariat aux droits de l’Homme, les deux rapports se basent sur plus de 65 missions effectuées dans les régions de Kidal, Gao et Tombouctou et dans la capitale Bamako, afin d’interroger plus de 230 personnes, parmi lesquelles des victimes, des témoins et des protagonistes des événements de Kidal et de Tin Hama dans la région de Gao.
A Kidal, le premier rapport met en cause les groupes armés pour des « violations et abus de droits de l’homme ». Les forces armées maliennes sont également désignées. A Tin Hama les Nations Unies pointent le Gatia et l’inaction des Famas.
Commentant ces documents, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a estimé que « c’est dans leur façon de répondre aux événements de Kidal et Tin Hama, et en mettant fin à l’impunité, que les autorités maliennes et les groupes armés signataires de l’accord d’Alger feront véritablement la preuve de leur engagement en matière de droits de l’homme ».
La Coordination des groupes armés rejette le rapport de l’ONU et dément « de manière catégorique » les informations sur les cas de violations des droits de l’homme. La CMA demande plutôt « une enquête indépendante internationale », et affirme « respecter les formes conventionnelles » lors des différents affrontements qui ont eu lieu au Nord. Attaye Ag Mohamed est chargé des questions de Droits de l’Homme au MNLA, membre de la CMA. Il est joint au téléphone par Intala Ag Bilal :
« Nous avons pris acte de ce document des Nations Unies. Ce sont des informations qui ne sont pas des faits avérés. C’est pourquoi nous avions exigé que la commission d’enquête internationale indépendante démarre. Elle est la seule en capacité de nous dire exactement ce qui s’est passé. Jusqu’ici nous, au niveau de la CMA, nous ne sommes pas au courant d’une information sur laquelle il y a eu des exécutions sommaires. Au contraire, nous sommes les seuls à avoir détenus des gens et les avoir libérés sains et saufs. Donc, il faut coûte que coûte que la commission d’enquête indépendante démarre et que l’on puisse vraiment être sûr de la véracité des accusations de part et d’autre. La CMA dément ces informations sur les accusations. C’est archi-faux. Nous démentons les allégations selon lesquelles il y a eu des exécutions sommaires. La CMA le dément au plus haut niveau particulièrement le MNLA, qui a fait preuve de respect des droits humains dans tout cela ».
Quant à la Plate-forme, elle se refuse à tout commentaire. Selon son porte-parole, ce rapport de l’ONU est « en contradiction avec d’autres rapports fournis par les instances habilitées du Comité de suivi et de mise en œuvre de l’accord d’Alger ». Me Harouna Touré, porte-parole de la Plate-forme, joint par Issa Fakaba Sissoko :
« On n’est pas censé savoir ce qui s’est passé au moment de la constatation de ces faits, puisqu’on n’a pas été convié. Donc si l’ONU vous dit qu’il y a des violations dans lesquelles la Plate-forme ou la CMA est impliquée c’est à l’ONU qu’il revient d’apporter la preuve de cette implication. Et puis nous n’avons pas été à contactés pour constater de façon consensuelle l’existence de ces faits. Nous, nous avons d’autres rapports contradictoires qui nous viennent d’une cellule de mise en œuvre de l’accord, et qui va sur le terrain à l’occasion de chaque événement et qui fait des constatations. Il n’a jamais été dit nulle part dans ces différents rapports que la Plate-forme est responsable de tel ou tel fait, vous voyez. Et Donc on ne peut que s’en tenir qu’à ces rapports là qui sont officiels et qui viennent d’une organisation prévue par l’accord. Je n’ai pas de commentaire parce que c’est un rapport qui m’est même inconnu. Je ne l’ai jamais vu, je ne l’ai jamais lu ».