L’UNESCO a saisi la Cour Pénale Internationale afin qu’elle engage des poursuites contre les jihadistes qui ont détruit les mausolées de Tombouctou. L’information a été révélée par la directrice de l’institution onusienne en visite ce week-end au Mali. Irina Bokova était hier à Tombouctou pour la réception de huit mausolées déjà reconstruits.
Selon la directrice générale de l’UNESCO, la procureure de la CPI avance rapidement dans le dossier. « J’espère qu’elle sera prête pour présenter le cas devant la cour », a-t-elle déclaré à la presse. Irina Bokova a rappelé que la destruction du patrimoine culturel est considéré comme un crime de guerre selon la convention de La Haye ».
En visite au Mali pour 24 heures, Irina Bokova a réceptionné hier samedi à Tombouctou les huit mausolées reconstruits grâce au concours de son institution. La directrice de l’Unesco a donné l’assurance que les autres mausolées seront aussi reconstruits avant la fin de l’année. « C’est par la reconstruction des mausolées que nous pourrons accompagner les accords de paix et restaurer l’identité de la ville », a estimé Irina Bokova.
L’UNESCO va aussi aider à la restauration des manuscrits ainsi que des mosquées de la ville. Et selon la directrice, trois millions de dollars sur les 11 millions nécessaires pour ces travaux sont déjà mobilisés.
Appelée la cité des 333 saints, la ville de Tombouctou abrite de nombreux mausolées, dont certains sont construits depuis le 13e siècle. En 2012, une bonne partie de ce patrimoine avait été détruite par les groupes narco-jihadistes qui avaient occupé le nord du Mali.
Cette restitution des mausolées de Tombouctou est bien accueillie par la population de la cité des 333 saints. Pour le chef de la mission culturelle de la ville, cette reconstruction marque une renaissance pour le monde entier. Alboukhari Ben Essayouti est joint au téléphone par Mohamed Salaha.
« Cette reconstruction n’est pas seulement pour la ville de Tombouctou, c’est pour le monde entier parce que c’est le patrimoine mondial. Donc la reconstruction marque une renaissance pour le monde entier. On peut même dire que c’est la population locale qui les a reconstruit, ce sont donc les compétences locales: les maçons, les menuisiers, les charpentiers, les ouvriers et tous ceux qui peuvent apporter des informations et des documentations pour que les mausolées soient refaits à l’original. Il y a eu un planning qui a été effectué avant et qui est en train d’être respecté. Tout ce qui relève du patrimoine mondial relève de l’UNESCO, Irina Bokova est la directrice générale de l’UNESCO, donc si elle saisit la CPI je pense qu’elle est en droit de le faire et attendons de voir ».
Les poursuites judiciaires engagées par la CPI contre les jihadistes peuvent-elles aboutir ? Selon certains spécialistes du droit, elles peuvent bien avoir une suite. Cependant, ces observateurs estiment que pour cela, la CPI aura besoin de la coopération de tous les États.
Maître Amadou Tiéoulé Diarra, est avocat à la Cour. Il est joint au téléphone par Sékou Gadjigo.
« Ces biens ont été classés patrimoine de l’humanité par conséquent leur destruction c’est vrai sur le plan national, le Mali en a souffert, mais au plan international et par extrapolation l’UNESCO en a souffert plus que le Mali. Et à ce titre l’UNESCO peut demander à la CPI de poursuivre les jihadistes.
Maintenant les jihadistes étant dans la nature, quel mécanisme va-t-on trouver pour mettre la main sur eux ?
Normalement pour cela, les pays où les jihadistes sont sensés se trouver aujourd’hui doivent être dans le collimateur de la CPI, ces pays doivent coopérer dès lorsqu’on sent qu’un jihadiste se trouve par exemple dans un pays A ou un pays B ou un pays C, le droit international de la CPI exige à ce que ces pays mettent aux arrêts tel ou tel jihadiste et le remette à la CPI ».