Le conseil de sécurité de l’ONU a examiné hier le rapport du secrétaire général de l’ONU sur le Mali. Le document relève les progrès enregistrés dans la mise en œuvre de l’Accord, mais souligne aussi la situation sécuritaire « de plus en plus dégradante avec de violations graves des droits de l’Homme ». Au cours de cette réunion, le Premier ministre malien et le chef de la Minusma ont convenu sur la nécessité de renforcer le mandat de la Minusma.
Devant le conseil de sécurité, le Premier ministre malien et le chef de la Minusma, n’ont pas lésiné sur les mots pour décrire les difficultés auxquelles font face les forces internationales et l’armée malienne. Selon le représentant spécial de l’ONU et chef de la Minusma, en l’espace de 4 mois la mission a perdu près d’une vingtaine de casques bleus, dont 12 pour le seul mois de mai. Une situation jugée « insupportable ».
Pour Mahamat Saleh Annadif, face à la détermination « des ennemis de la paix » et l’ampleur des récentes attaques meurtrières, il est nécessaire d’accroître les capacités des forces onusiennes en termes de personnel, d’équipements et de couverture aérienne.
Le chef du gouvernement malien va plus loin et demande une relecture du mandat de la mission onusienne en lui donnant « une posture plus robuste et plus active ». Modibo Keita a appelé le conseil de sécurité à soutenir le redéploiement des forces armées du Mali sur toute l’étendue du territoire une fois que les autorités intérimaires seront mises en place.
La France a annoncé qu’elle va présenter « très rapidement » aux autres membres du Conseil un projet de résolution visant à « renforcer la Minusma, à clarifier et rendre plus vigoureux son mandat ». Elle a aussi appelé les signataires de l’accord de paix « à accélérer son application ».
Le Premier ministre malien a appelé les mouvements armés au démantèlement de leurs bases et check-points, gage, selon lui, de bonne volonté et d’adhésion effective aux prescriptions de l’accord. Modibo Keïta a également exhorté les mouvements armés à communiquer dans un bref délai la liste de leurs combattants pour les patrouilles mixtes et le processus de désarmement.
« Chaque jour de retard pris dans la mise en œuvre de l’accord, c’est évidement un jour de plus gagné par les ennemis de la paix. Ceux qui ont juré et qui ont pris le parti de l’échec du processus de paix, nous devons nous en souvenir. J’en appelle aussi à la communauté internationale, au comité de suivi de l’accord pour qu’ils exercent leur rôle de garant, du respect des engagements par les parties en situant les responsabilités. Et ce, conformément à l’article 54 de l’accord, le démantèlement dans le meilleur délai des bases et des check-point de tous les mouvements signataires de l’accord. Ceci est un gage de bonne volonté et d’adhésion effective aux prescriptions de l’accord pour la paix et la réconciliation . Par ailleurs, l’établissement et la communication dans un délai déterminé des listes des combattants, listes toujours attendues,permettront d’opérationnaliser les patrouilles mixtes et d’entamer le processus de désarmement et de cantonnement ».
Certains observateurs restent sceptiques quant au changement du contenu du mandat de la Minusma. Ce mandat devrait être renouvelé le 30 juin prochain. Selon ces analystes, certains pays contributeurs ne seraient pas d’accord sous prétexte de risquer la vie de leurs soldats. Pour certains observateurs, le Mali devrait accélérer la remise en état des forces maliennes, car « au bout du compte ce sont les Maliens qui vont sauver le pays ».
Souleymane Drabo est éditorialiste. Il est joint au téléphone par Mouhamadu Touré
« Moi je doute vraiment que le conseil de sécurité veuille muscler jusqu’à un certain point le mandat. Mais ce dont je suis sûr, c’est qu’il est obligé de changer de mandat, parce que la Minusma a perdu tellement d’hommes qu’il n’est plus possible qu’elle reste cantonner dans ces camps comme elle l’avait jusqu’à présent. Il faut qu’elle patrouille aux alentours ne serait-ce que pour sa propre sécurité à elle. Vous savez pour le renouvellement du mandat, l’ONU c’est une énorme bureaucratie aussi, et les choses ne sont pas aussi rapides que ça. A supposer même que le conseil de sécurité décide de l’augmentation des troupes de la Minusma, qu’il décide de l’envoi de nouveaux matériels, qu’il décide du transfert de la Force d’intervention de la Côte d’Ivoire, je pense que les premiers éléments pourront arriver au Mali en début 2017 ainsi que le premier matériel supplémentaire qui sera accordé. Donc même s’il y a une décision, l’effet ne sera pas immédiat. Moi je pense que le gouvernement devrait accélérer la remise en état des forces armées maliennes, parce qu’au bout du compte sauver notre pays, c’est nous qui le ferons. Ce ne sont ni les forces de l’ONU ni les français de Barkhane ».