Le Comité international de la Croix-Rouge a annoncé ce vendredi la reprise de ses activités dans la région de Kidal. Le 24 avril dernier, le CICR avait décidé la “suspension provisoire de toutes les activités de la sous-délégation de Kidal”, pour raisons de sécurité. Au même moment, certains observateurs estiment que les opérations françaises dans le Sahel ont « échoué ». Selon eux, «le niveau d’insécurité au Mali n’a jamais été aussi élevé qu’il ne l’est aujourd’hui».
Le CICR avait décidé de suspendre ses activités à Kidal à la suite d’un cambriolage, le deuxième en moins de trois mois, signe pour l’organisation d’un « problème général de sécurité dans l’environnement de Kidal ».
Le CICR a affirmé ce vendredi qu’“après avoir obtenu les garanties de sécurité nécessaires pour le personnel et les biens du CICR auprès des autorités et des leaders de la région », l’organisation a « décidé de reprendre ses activités humanitaires au profit des populations victimes du conflit armé et des violences dans la région de Kidal.
Le CICR précise que les programmes d’urgence, à savoir la fourniture d’eau potable et le soutien à l’hôpital de Kidal, n’avaient pas été concernés » par cette suspension.
Selon un rapport publié cette semaine par l’Association malienne des droits de l’homme (AMDH) et la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), « le Mali connaît actuellement un niveau d’insécurité sans précédent » depuis plus de quatre ans. Le document indique qu’au premier trimestre 2017, « les actes contre les forces internationales et l’armée malienne ont fait au moins 110 morts », dont trois Casques bleus et un soldat français.
A Kidal, cette reprise des activités du CICR redonne espoir aux populations au moment où la région fait aussi face à des problèmes sanitaire et alimentaire. Selon Ahmoudène Ag Iknass, député élu à Kidal, « le CICR reste le partenaire le mieux indiqué pour être partout et pour tous » :
« Nous sommes vraiment heureux du retour du CICR à Kidal. Je crois que le CICR est le partenaire le mieux indiqué pour être dans une zone comme celle-là. Les populations traversent beaucoup de problèmes, il n’y a pas beaucoup d’eau, il y a des problèmes sanitaires et il y a même un problème d’approvisionnement en aliment au niveau de la région de Kidal. Nous pensons que c’est le seul programme qu’il faut d’abord à Kidal. Son mandat lui recommande la neutralité universelle, donc, cela lui donne beaucoup de poids pour pouvoir aider tout le monde ».
Est-ce qu’aujourd’hui on peut parler de quiétude, de sécurité à Kidal ?
« Personne ne peut donner une garantie de sécurité à Kidal. L’appel que j’ai à lancer à tous les partenaires, c’est la neutralité entre les populations et entre les mouvements, particulièrement au CICR car c’est le partenaire qui doit être partout et pour tous ».
Face à cette insécurité à laquelle le pays fait face, plusieurs mesures ont été prises. Parmi elles, l’intervention française. Cependant, certains observateurs estiment que cette opération a totalement échoué. Selon Laurent Bigot, «le niveau d’insécurité au Mali n’a jamais été aussi élevé qu’il ne l’est aujourd’hui». L’ancien diplomate français déclare aussi que «l’armée française est perçue comme une armée d’occupation» au Sahel.
Laurent Bigot :
« Le Nord et le Centre du Mali sont d’ailleurs carrément hors contrôle. Donc l’opération qui visait à sécuriser ces zones-là, a totalement échoué. Regardez les objectifs de l’opération Barkhane et regardez la réalité sur le terrain, il y a une incohérence totale. C’est à dire que, c’est une opération qui vise à sécuriser la zone, or la zone n’a jamais été aussi insécurisée qu’aujourd’hui. Je rappelle que l’attaque de Gao, peu de temps après le sommet Afrique France, a été la plus meurtrière de toute l’histoire du Mali. Le déclenchement de l’opération au Mali et en RCA au départ avait une justification compréhensible par tous, mais l’absence de vison politique et stratégique a fait que ces opérations militaires n’ont absolument servi à rien et ont même accentué le mal puisque aujourd’hui notamment dans le Sahel, le niveau de violence et de l’insécurité n’a jamais été aussi élevé et puis un sentiment anti-français est en train de naître parce que l’armée française est perçue comme une armée d’occupation qui s’autorise beaucoup de choses. Il faut se poser la question de ce que veulent les pays africains pour le continent africain avant de s’arroger le droit, le devoir, la mission de pouvoir intervenir. Je pense que c’est ça le sujet. Or, on sait bien que les pays africains n’ont pas la même vision de la menace terroriste que nous avons, et que nous pourrions d’abord nous pencher sur la vision africaine avant d’imposer la nôtre ».