Après le report d’hier, les commissions ont restitué les conclusions de leurs travaux ce samedi. Chacune d’elles a présenté son analyse approfondie des causes de la crise, proposé des solutions et fait des recommandations. Les différents rapports ont été adoptés sous réserve d’introduire d’autres recommandations.
Selon le Président du Comité de Suivi de l’Accord, toutes les questions qui entravent la mise en œuvre de l’accord ont été débattues lors de ces assises. Alors que la CMFPR II et le Congrès pour la justice dans l’Azawad pensent que leurs attentes n’ont pas été comblées.
L’amélioration de la gouvernance, la distribution équitable de la justice, la restauration de l’autorité de l’Etat, le développement des régions du nord, l’application des accords de paix sont entre autres les recommandations formulées par les commissions. Aucun consensus n’a été trouvé sur la référence « Azawad » et le contenu à lui donner. Certaines commissions demandent l’organisation d’un référendum sur la question.
Dans son rapport, la commission de la réconciliation propose d’ouvrir des discussions avec tous les fils du pays y compris les islamistes. Toutefois elle estime que le caractère laïc du pays doit prévaloir dans ces pourparlers. Quant à la commission unité nationale, elle recommande le brassage culturel et l’enseignement de l’histoire et la géographie du Mali dans les programmes.
Après les différentes présentations, les participants ont eu droit à la parole. C’est ainsi que certains ont insisté sur le retour de l’ancien président Amadou Toumani Touré ainsi que tous les Maliens réfugiés dans les pays voisins. D’autres intervenants exigent que la question de Kidal soit réglée avant la fin de la conférence.
Le Président du Comité de Suivi de l’accord se félicite de la tenue de la conférence d’entente nationale. Selon lui toutes les questions qui entravent la mise en œuvre de l’accord ont été débattues lors de ces assises. Ahmed Boutache est le Président du Comité de Suivi de l’accord :
« La mise en œuvre de l’accord produit des résultats tangibles, concrets. Et, je pense que la tenue de la conférence en est une manifestation très concrète. Nous ne pouvons que nous féliciter, nous réjouir de ces pas positifs qui sont accomplis progressivement».
Est-ce que toutes les questions ont été débattues ?
« Sans exclusives. Tout a été débattu. Rien n’a été mis de côté et il ne fait aucun doute que les enfants du Mali, qu’ils soient du nord, du centre ou du sud, continueront à travailler ensemble pour trouver la solution consensuelle qui arrange tout le monde sur ce point là. On peut retenir que cette conférence met fondamentalement en valeur l’attachement de tous les Maliens au dialogue et à la résolution, à la prise en charge de leurs problèmes entre eux et à leur résolution par le dialogue. Et, on ne peut encore une fois que se féliciter de cela.»
A 24 heures de la fin des travaux de la Conférence d’entente nationale, certains participants pensent que leurs attentes n’ont pas été comblées. Le Congrès pour la justice dans l’Azawad se montre sceptique quant à la prise en compte réelle des préoccupations des populations à cette conférence d’entente nationale. Selon ses responsables, la tentative par le gouvernement d’installer les autorités intérimaires à Tombouctou en pleine conférence témoigne du manque d’inclusivité qui a toujours marqué la mise en œuvre de l’accord. Hamatta Ag Elmahdy, chargé de communication du CJA :
«Si vous me demandez personnellement, si cette conférence va répondre aux défis du moment, je n’en suis pas sûr. Mais, nous espérons en tout cas que les causes profondes du conflit, que la problématique de l’Azawad, que le problème d’inclusivité seront traités au cours de cette conférence. C’est ça nos attentes en réalité. Effectivement depuis, presque un mois maintenant, le CJA et la société civile de Tombouctou qui se sentaient exclus des autorités intérimaires dans les régions se sont opposés à l’installation de ces autorités intérimaires. Depuis lors, nous étions dans des discussions avec le gouvernement et nous espérons que cela va nous amener à traiter la question d’inclusivité, parce que tant que cette problématique n’est pas traitée dans le fond, je ne pense pas que nous puissions avancer dans la mise en œuvre de l’accord. On a entendu que le gouvernement avait décidé d’installer les autorités intérimaires à Tombouctou pendant que, et le CJA et la délégation de la société civile sont venus à la conférence d’entente nationale. Cela ne nous a pas plu, nous l’avons dénoncé ».
Selon les responsables de la CMFPR II, les assises de Bamako qui sont intervenues dans un contexte de division des Maliens, n’ont pas permis de sceller une véritable réconciliation. Aussi, la CMFPR II interpelle le ministre de la réconciliation sur l’utilisation des fonds.
Seydou Amadou Cissé, membre de la CMFPR II :
« J’ai une mauvaise impression de cette conférence d’entente, parce que si c’est le sommet qui doit parler d’entente ici, si c’est les cadres qui doivent se regrouper pour parler d’entente, je ne vois pas l’entente. Moi, depuis le premier jour, j’ai demandé au ministre de la réconciliation où sont les fonds de la réconciliation ? Depuis 5 ans ce ministère est créé, alors, il faut venir à la base, dans les villages, dans les cercles, dans les régions du nord touchées par la rébellion, voir tout ce qui a été causé comme dégâts. Vraiment il faut que les populations à la base s’entendent d’abord. Parce que le gouvernement, je ne sais pas pour quelle raison, peut-être pour une raison politique ou pour finir le mandat, ils ont divisé les marabouts, ils ont divisé les femmes, ils ont divisé les jeunes, ils ont divisé les mouvements armés, ils ont divisé même les responsables politiques des mouvements armés à Bamako. Chacun a son parti, son agenda. Donc en réalité, même en ce qui concerne nos dirigeants, nous commençons à comprendre qu’ils ne travaillent pas pour nous à la base et les accords sont gérés dans le désordre. La conférence d’entente nationale doit venir après qu’on ait retiré les armes aux jeunes ».