Le gouvernement ouvre une enquête sur l’affaire des « 13000 fonctionnaires fictifs » et sur les « détournements des primes globales d’alimentation », PGA, au sein de l’armée. L’annonce a été faite hier par le Ministre de la Justice, Garde des sceaux, qui a instruit au Procureur général près la Cour d’Appel de Bamako des dispositions quant à la saisine éventuelles de cabinets d’instructions. Selon des spécialistes du droit, ces suites judiciaires ont des raisons d’aboutir si la volonté politique affichée reste maintenue.
Selon le ministère de la fonction publique, ces fonctionnaires fictifs ont été découverts à la faveur de contrôles physiques dans les services publics en relation avec les paiements des salaires . Ces contrôles ont révélé en effet l’existence de 13.000 travailleurs fictifs au sein de la fonction publique. Ces fonctionnaires étaient pour la plupart des travailleurs décédés, ou qui avaient quitté la fonction publique pour d’autres employeurs.
Pour le ministère de la fonction publique, cette fraude a généré une perte de 30 milliards de francs CAF par an pour l’État.
Le Ministre de la Justice, Garde des Sceaux s’est saisi du dossier et a demandé l’ouverture d’une enquête pour « situer les responsabilités ». Le ministre de la justice a demandé aussi au Procureur général de la Cour d’Appel de Bamako d’élargir ces suites judiciaires à l’affaire des détournements des primes des militaires.
Si le communiqué du ministère ne donne pas de précisions chiffrées sur le montant de ces détournements, il évoque de présumées malversations autour des primes globales d’alimentation dues aux militaires. Pour le ministère de la justice, « des communiqués seront régulièrement diffusés à ce sujet ».
Du point de vue juridique, et selon des spécialistes, les poursuites ont des chances d’aboutir si la volonté politique reste maintenue. Selon eux, la première piste à explorer par les enquêteurs est sans doute de remonter le circuit des paiements des salaires pour les fonctionnaires fictifs, et celui de l’ordonnance et l’exécution des dépenses pour ce qui concerne les détournements des primes des militaires.
Me Abdourahamane Ben Touré est avocat au barreau malien. Il est joint par Issa Fakaba Sissoko :
« Il faut faire la différence entre ces deux types de fonctionnaires. Les irréguliers qui se sont servis de faux actes d’intégration, ils peuvent être présents dans le travail, faire le travail, ils peuvent même être souvent très bons. Ça c’est une situation différente de celle de personnes qui perçoivent les salaires de personnes décédées ou qui perçoivent trois ou quatre salaires avec des noms carrément différents.
Quelque soit la situation, dans un cas ou dans l’autre, il y a un faux à la base, de sorte que ces agents sont connus, identifiés et qui peuvent être poursuivis en justice. Et les agents qui touchent ces salaires, on peut remonter toute la filière à travers les données qui sont au niveau du bureau central des soldes et au niveau des départements à travers des services chargés des ressources humaines.
En ce qui concerne maintenant les indemnités au niveau des forces armées et de sécurité, ça procède de la même logique. Là aussi la tâche est d’autant plus facilitée que tout le monde n’est pas chargé des fonds dans un ministère. Donc, une fois de plus, le procureur de la République mis sur le coup, et si la volonté politique affichée est maintenue, on pourra avoir des résultats ».