Un Malien a été expulsé de France vendredi « pour son appartenance à la mouvance islamique pro-jihadiste ». Moussa Keïta a été libéré de prison le même jour, où il avait purgé une lourde peine pour des faits de délinquance de droit commun. Au Mali, les autorités se refusent à tout commentaire sur cette expulsion.
C’est par un arrêté en date du 1er août 2016 que le ministère français de l’intérieur a décidé de l’expulsion de Moussa Keïta. Le ressortissant malien est accusé « d’appartenir à la mouvance islamiste pro-jihadiste ».
Pour les autorités françaises, Moussa Keïta pèse « une menace grave » sur l’ordre public. Le Malien expulsé venait de purger une peine de prison pour des faits de délinquance de droit commun.
Il avait été condamné pour plusieurs vols avec arme en bande organisée, a précisé une source proche du dossier, citée par l’AFP. Selon cette source, Moussa Keïta avait annoncé vouloir rejoindre les troupes combattantes de jihad syro-irakiennes.
L’expulsion de Moussa Keïta porte à 81 le nombre de mesures prises en la matière par le ministère français de l’intérieur depuis 2012. Les autorités maliennes n’ont pas souhaité commenter cette expulsion.
Le Haut conseil des Maliens de France interpelle les autorités maliennes pour la protection des droits des Maliens de l’extérieur. Selon ses responsables, Moussa Keïta aurait la nationalité française. Des discussions devraient être entreprise avec la famille de l’intéressé pour savoir s’il est né en France ou au Mali. Le Haut conseil se réserve de le qualifier de « terroriste » sans avoir des preuves de la part des autorités françaises.
Sadio Diakité est Secrétaire général du Haut conseil des Maliens de France. Il est joint au téléphone par Ayouba Sow :
« Les informations qu’on a pu recueillir révèlent qu’il a la nationalité française, ce qui reste à vérifier au niveau des autorités françaises, qui communiquent peu sur cette affaire. Les Français ne disent pas un franco-malien, mais à travers les informations qu’on a pu recueillir au sein de la communauté, c’est un franco-malien ».
Quelle est votre position par rapport à cette procédure ?
« Le Haut conseil suit son investigation pour entrer d’abord en contact avec la famille de Moussa Keïta afin d’avoir toutes les informations sur la question et voir ce qu’on peut faire dans les jours à venir. Pour nous, ce sont des injustices, les Maliens doivent se concerter pour manifester leur mécontentement. Mais il faudrait aussi que l’Etat malien arrive à suivre et à apporter tout son soutien aux citoyens maliens, sachant qu’on a quand même un ministère des Maliens de l’extérieur. Jusqu’à présent on ne connaît pas le rôle et l’utilité de ce ministère-là ».
Jusqu’à la journée d’hier le Haut conseil islamique du Mali ignorait l’existence de Moussa Keïta. Selon les responsables de l’organisation, Moussa Keïta se serait radicalisé pour des raisons propres à la société française. Pour le Haut conseil islamique, de nombreuses campagnes sont d’entreprises depuis l’éclatement de la crise de 2012 pour lutter contre la radicalisation partout au Mali.
Mouhamoud Dicko, président du Haut conseil islamique du Mali interpelle le ministre des affaires religieuses tout en déplorant l’inexistence d’une politique de contrôle des prêches au Mali. Il a été joint au téléphone par Ayouba Sow :
« Que les jeunes gens comprennent qu’en réalité l’Islam n’a rien à voir avec cette radicalisation dont on parle, ou du terrorisme. On ne se radicalise pas parce qu’on est Musulman ou Chrétien. On se radicalise tout simplement parce que des contextes ou des situations exigent à ceux que d’autres soient des radicaux. Nous avons porté ce discours et nous continuons de le porter. Notre Prophète en temps de guerre a dit dans les expéditions, « vous ne tuez pas les femmes, tous ne tuez pas les enfants, vous ne tuez pas les vieilles personnes, vous trouvez des gens dans leurs synagogues, dans leurs églises, dans leurs temples en train d’adorer Dieu. laissez-les avec leurs dieux ». Alors, ça c’est l’enseignement de l’Islam. On ne peut pas comprendre qu’on fasse le contraire au nom de l’Islam ».
Est-ce qu’aujourd’hui le Haut conseil islamique dispose d’un système de contrôle des prêches au Mali ?
« Ce n’est pas le Haut conseil qui est compétent dans ce domaine. Nous avons un ministère des affaires religieuses qui est là, l’instrument du gouvernement pour faire ce travail. Nous pouvons le faire, mais aujourd’hui, juridiquement nous n’avons pas compétence, il n’y a pas de politique conséquente dans ce domaine. Jamais, depuis que le département existe, on ne s’est mis ensemble pour voir comment on peut définir un cadre juridique dans lequel les prêches vont se faire ».