Le Mali et l’Union européenne se sont accordés pour « gérer ensemble » l’immigration, en finançant des projets pour lutter contre ses causes et promouvoir la migration légale. Cette annonce est intervenue au terme de la visite à Bamako du ministre néerlandais des Affaires étrangères Bert Koenders. Mais les organisations de défense des migrants sont sceptiques quant à l’impact du financement des projets dans la réduction de la migration.
Bert Koenders, dont le pays assure actuellement la présidence de l’UE, a effectué une visite de deux jours au Mali avant de se rendre au Ghana et en Côte d’Ivoire. Sa tournée en Afrique de l’Ouest est axée sur l’application du plan d’action adopté entre États européens et africains au sommet de La Valette sur l’immigration en novembre dernier. L’UE avait alors décidé d’aider financièrement l’Afrique pour endiguer les flux de migrants, avec un fonds d’1,8 milliard d’euros.
La rencontre entre Bert Koenders et le Premier ministre Modibo Keita a essentiellement porté sur trois points : favoriser le maintien des candidats au départ en Europe, l’arrêt de l’immigration clandestine et la « migration légale ».
Dans un communiqué commun, Bamako et Bruxelles « se sont engagés à gérer ensemble les flux migratoires dans tous leurs aspects « . Les deux parties se sont notamment accordées pour « lutter contre les causes profondes » de ce phénomène par des investissements au Mali et « en créant des emplois décents » pour la jeunesse de ce pays, ainsi que par une « sensibilisation de la population contre les risques de la migration irrégulière ».
Le communiqué fait état de « trois projets au profit du Mali. Ces projets ont été approuvés pour un montant de 43,5 millions d’euros (soit environ 28,5 milliards de FCFA) et d’autres qui seront proposés pour adoption le 18 avril ».
Le Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, Berth Kondoers, a donc rencontré hier le Premier ministre malien Modibo Keita. Les échanges entre les deux hommes ont porté sur les questions liées à la migration. Selon Berth Kondoers « il faut développer des projets et l’entrepreneuriat pour maintenir les jeunes » au pays.
Berth Kondoers, est au micro de Oumar Waïgalo :
« On a discuté des voies et moyens d’internationaliser les conclusions de Valette. Je crois qu’il y a trois éléments cruciaux maintenant : premièrement, ça doit être un accord équitable, deuxièmement, nous devons nous assurer qu’il y a des projets et il y a aussi un fonds fiduciaire pour aider les Maliens à trouver du travail. La situation sécuritaire que je connais au Mali est marquée par beaucoup de flux migratoires qui sont illicites, et qu’il y a des gens qui profitent de cette situation. Mais ce sont des Maliens qui meurent dans la Méditerranée. Il faut avancer des projets sur le contrôle frontalier, les passeports biométriques etc…
Il faut faire une distinction de la migration légale saisonnière et la migration clandestine. Il y en a des Maliens qui travaillent chez nous. Je crois que c’est aussi au profit de l’économie européenne. Mais de l’autre côté, c’est du travail illégal, et je voudrais donner des conseils aux Maliens : i y a beaucoup des risques sur la Méditerranée. On ne trouve pas un futur radieux en Europe, à moins que ça ne soit dans une manière légale ».
Les organisations de défense des migrants sont sceptiques quant à l’impact du financement des projets dans la réduction de la migration. L’Association Malienne des Expulsés regrette «l’absence de concertation » avec les organisations de migration dans la conception et la mise en œuvre de ces nouvelles stratégies sur l’immigration. Selon l’AME, « cette visite du ministre Néerlandais des affaires étrangères ne pourra pas endiguer le phénomène de la migration ».
Ousmane Diarra, président de l’Association Malienne des Expulsés est au micro de Ayouba Sow :
« Je pense que cette mission n’a pas de sens. Parce que, si on parle aujourd’hui de la migration sans que les migrants ne prennent part au débat, je pense qu’il n’a pas de sens. Le ministre Néerlandais des affaires étrangères n’a rencontré aucune organisation de la société civile ».
L’Union européenne s’engage à financer des projets pour réduire le flux migratoire. Pensez-vous que c’est suffisant ?
« Je pense que ce n’est pas du tout suffisant, parce qu’on a eu beaucoup de projets. Il y avait des projets de co-dévelopement, plusieurs projets ont été exécutés, mais sans succès. Je voudrais dire que tous ces financements qu’ils sont en train d’initier et tous les financements pour les pays du sud, ne sont pas très souvent des financements qui peuvent développer le secteur de la migration. Aujourd’hui les gouvernements Européens et Africains doivent trouver la réponse du travail ».
Un financement est justement prévu pour cela…
« Même si l’argent est là, les jeunes ne le voient pas. Toutes les conventions que le ministre Néerlandais signera avec le gouvernement, je pense que la finalité ne sera pas une solution ayant trait à stopper la migration ».