La force de l’ONU au Mali a des lacunes, selon son chef militaire. Les Casques bleus au Mali ont subi les plus lourdes pertes parmi les missions de l’ONU. Le général danois Lollesgaard estime que les Casques bleus sont vulnérables et n’ont pas l’entraînement, la logistique et les capacités de renseignement nécessaires pour remplir au mieux sa mission.
Des 16 missions de l’ONU dans le monde, la Minusma est celle qui a subi le plus de pertes, avec 36 soldats tués et plus de 200 blessés depuis son déploiement en 2013. Les Casques bleus sont victimes des groupes armés actifs dans le nord du Mali qui utilisent engins explosifs, attaques suicides, embuscades et tirs de mortiers sur leurs bases. Le général Lollesgaard lui-même se trouvait dans un convoi de l’ONU visé le 28 mai par une attaque revendiquée par Aqmi. Pour lui, la Minusma « aurait pu éviter certaines de ces pertes », si ses soldats avaient été mieux formés et entraînés par leurs pays d’origine avant leur déploiement.
« Beaucoup de ses soldats, dit-il, « ne sont pas assez bons dans les compétences de base requises », comme repérer des mines ou appeler à l’aide des hélicoptères pour évacuer des blessés. Selon lui, la Minusma doit aussi avoir des contacts plus étroits avec la population locale et mieux se protéger des attaques, que ce soit en patrouilles ou de retour à la base. « Nos troupes méritent d’être bien protégées dans leurs camps contre les tirs et les véhicules piégés, ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas », a expliqué le général.
Le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour le Mali Mongi Hamdi sera reçu demain par Laurent Fabius, ministre français des affaires étrangères. Officiellement, ils feront le point sur le processus de paix et sur l’accord de paix signé le 15 mai dernier et qui devrait être signé le 20 juin prochain à Bamako par la partie qui ne l’a pas encore fait. La question du renouvellement du mandat de la Minusma sera sans doute abordé.
Pour certains observateurs, les déclarations du général Lollesgaard sont un message à l’endroit de la communauté internationale face à la nécessité de renforcer les moyens d’intervention des casques bleus au Mali. Ainsi selon Serge Daniel, « les soldats de l’ONU doivent aller au contact de l’ennemi au lieu de se faire surprendre ».
Serge Daniel est journaliste, écrivain. Il est joint au téléphone par Issa Fakaba Sissoko :
« Nous sommes à la veille du renouvellement du mandat de l’ONU dans le Nord du Mali. L’idée est la suivante : c’est de dire qu’on s’est trompé, il faut un mandat plus robuste pour la Minusma. Le mandat plus robuste doit entraîner une présence plus importante de matériels de guerre (tels les avions) et les troupes. Donc, si vous voulez c’est un message qu’il lance à la communauté internationale, mais il ne dit strictement rien de nouveaux. L’erreur de la communauté internationale dans le Nord du Mali est de s’être trompée sur les acteurs sur le terrain. Ensuite après l’intervention Serval, il fallait passer le relais. Mais malheureusement, la mission de l’ONU n’avait pas les moyens de prendre le relais de la France ».
Ces révélations ne posent-elles pas aussi la problématique pour nos armées africaines de passer à la vitesse supérieure en terme de formation ?
« Le problème c’est la faute aux Nations Unies. Pour être ce qu’on appelle Casque bleu de l’ONU, il y a des critères. Si les hommes ne remplissent ces critères je ne vois pas pourquoi il ne faut pas leur faire une mise à niveau. Donc, cela est de la responsabilité des Nations Unies ».
Ces déclarations du général Lollesgaard interviennent au moment où l’insécurité sévit dans plusieurs localités du pays. Ce mardi près de Mopti, cinq membres d’un groupe armé ont été tués au cours d’un accrochage avec l’armée malienne. L’information a été communiquée mercredi par l’état-major et le ministère de la Défense. « Le bilan est de cinq morts du côté des terroristes et un soldat malien a été blessé », a annoncé un porte-parole du ministère sans préciser à quel groupe ils appartenaient. Selon une source militaire, il s’agit d’un mouvement peul formé récemment et baptisé Front de libération du Massina.