Plusieurs centaines de personnes ont manifesté pour la deuxième journée consécutive, hier à Kidal, contre l’accord de paix provisoire signé le 1er mars à Alger. Entre 150 et 200 personnes venues de toute la région, notamment de Mauritanie, du Niger, de Libye et d’Algérie, en grande majorité des Touareg et leurs alliés, participent depuis hier aux consultations organisées par la Coordination des mouvements de l’Azawad. La rencontre va durer plusieurs jours, selon des responsables de la CMA.
La rencontre de Kidal se déroule sous haute tension tant les positions des différents membres de la coordination apparaissent éloignées sur la question du statut de l’Azawad. Son porte parole Mohamed Ousmane Ag Mohamedoun, s’est employé hier a expliquer le travail des leaders réunis actuellement, « un travail qui doit être respecté ». a-t-il répété . Pour lui « il faut garder l’espoir. Il faut être optimiste . Il y a de fortes probabilités qu’on y arrive. ». Pour autant la pression internationale ne faiblit pas. Hier Jean Yves Le Drian le ministre français de la défense a exhorté « tous les groupes, à quitter la logique d’affrontements et à rallier le processus politique en cours ». Selon une source diplomatique malienne « des diplomates de plusieurs pays européens à Bamako envisagent de se rendre à Kidal pour encourager à la signature de l’accord ». On est loin pourtant du consensus actuellement à l’image de rencontre dans la nuit de dimanche à lundi à Niamey avec des représentants de la rébellion, le gouvernement nigérien et le chef de la Mission de la Minusma, Mongi Hamdi, qui a échoué à trouver un accord en faveur de la signature.
La coordination des groupes armés n’a donné aujourd’hui aucune garantie sur le fait qu’elle va parapher le document d’Alger à l’issue de ses concertations . Ses responsables, vont même jusqu’à dire que le rejet du projet d’accord ne signifierait pas l’abandon du processus de paix par la coordination.
Attaye Ag Mohamed est coordinateur de la commission des droits de l’Homme au MNLA. Il est joint par Salimata Dao
« Si on signe un accord de paix, on le signe à l’intention des populations. On ne peut pas signer un accord qui exclut les populations. Il y a pas mal de délégations qui sont attendues. La rencontre se fera sur trois jours. Il y aura une déclaration finale dans laquelle l’exécutif de la Coordination des Mouvement de l’Azawad dira ce que dira le peuple. Il est difficile de vous dire tout de suite qu’il y a espoir que le document soit paraphé à l’issue de cette rencontre. Ne pas parapher ce document ne va pas signifier qu’on sort du processus de paix. Le processus peut continuer même si on ne signe pas ce document, même si on réclame avoir encore des amendements à apporter. La paix ça se construit, ça se dicte pas, c’est pas une résolution, c’est un consensus. Il ne faut pas oublier qu’on est chaque fois visé nous aussi par les groupes terroristes. Aujourd’hui si on veut arrêter ce terrorisme il faut que l’ensemble des communautés, des peuples qui vivent sur cet espace qu’on appelle le Mali, s’entendent sur un système de gestion, d’administration et de gouvernance ».
Pour un certain nombre d’observateurs, les circonstances actuelles vont pourtant obliger la Coordination des mouvements armés à parapher le projet d’accord. Mais, selon eux, le désarmement doit précéder la signature définitive de l’accord.
Pr. Issa N’Diaye est philosophe, chargé de cours à l’Université de Bamako. Il a été joint par Issa Fakaba Sissoko.
« Je pense que logiquement ils n’ont pas le choix, tout comme le gouvernement malien n’a pas eu le choix. Leurs parrains occidentaux ont décidé une formule, il va falloir donc qu’ils s’y plient. S’ils ne s’ y plient pas, ce serait donc assez grave pour eux. Les circonstances actuelles les obligent à aller vers ça. S’ils ne signent pas l’accord, ils seront menacés de disparition. L’autre aspect de la question, qu’elle va être de toutes les façons la suite pour eux ? Est-ce qu’ils vont signer l’accord du bout des lèvres et continuer à faire ce qu’ils ont fait jusqu’ici ? Quel va être le sort des porteurs d’armes? C’est la grande question. La solution à mon avis, tant que le système des Nations Unies, la Minusma et Barkhan n’intégreront pas le fait qu’il y a nécessité coûte que coûte de désarmer les groupes rebelles, tous ceux qui sont porteurs d’armes. Tant qu’on ne viendra pas à cette solution, le problème reviendra. Maintenant si on veut vraiment qu’il y ait la paix, il faut désarmer les groupes armés qu’ils le veulent ou pas, et les cantonner pour pouvoir les identifier et les contrôler. Est-ce que cette volonté politique existe au niveau de la Minusma ou de la France ? Il est permis d’en douter ».