En début de semaine l’Institut Malien de Recherche Action pour la Paix a présenté son Autoportrait du Mali sur les obstacles à la paix. En collaboration avec Interpeace l’IMRAP a procédé à plus de 4500 entretiens dans les différentes régions du pays. De là a été élaboré un document qui recense précisément ce qui aux yeux de l’opinion malienne alimente les crises auxquelles le pays est confronté depuis de longues années.
L’IMRAP a recensé trois raisons principales pouvant en partie expliquer les difficultés du Mali. La première concerne a défiance des maliens vis à vis des discussions qui conduisent à des accords.
Mme Néné Konaté directrice exécutive de l’IMRAP participait au Grand Dialogue du mardi soir.
« Des consultations que nous avons mené sur le terrain et allant dans le sens des accords, c’est que les communautés ont exprimé une confiance très limitée en ce genre de processus. Dans toutes les régions du Mali, nous avons pu constituer une dizaine de focus groupes dans diverses localités au sein de chaque région ainsi que dans les camps de refugiés. Ces populations ont exprimé une confiance limitée par rapport aux retombées positives de ce qui sort des accords. De part le passé, elles ont une mauvaise expérience que chaque accord a amené avec lui ses germes pour un nouveau conflit ».
Défiance de la légitimité de ceux qui négocient, mais aussi forte mise en question de la décentralisation qui selon l’enquête de l’IMRAP apparaît plus comme un problème que comme une solution.
Oumar Sacko président du Conseil d’Administration de l’institut qui participait lui aussi à l’émission.
« Ce que les populations ressentent, je crois que c’est un problème de redevabilité des gouvernants par rapport aux gouvernés. Les populations ont une sorte de défiance et souhaiteraient qu’on puisse leur rendre compte. Il y aura lieu d’œuvrer à cela si on veut conforter ce processus de décentralisation, malgré les grandes résolutions qu’on a prises au niveau des états généraux ».
Enfin parmi les raisons qui expliquent la récurrence des crises, les personnes questionnées par l’IMRAP mettent l’accent sur les discours véhiculés au nord comme au sud qui alimentent les antagonismes. Docteur Hamidou Magassa socio-économiste et chercheur a travaillé sur le document de l’IMRAP.
« On paye ce qu’on a semé, il n’y a pas de doute et au bout de cet exercice j’espère que les gens s’arrêteront de faire le nombrilisme et de regarder ensemble qu ‘est ce qu’on peut faire. On a un problème de fond qui est un problème de distribution et redistribution du pouvoir de manière équilibrée. Ce n’est pas une question de Nord-Sud, on pense toujours que l’autre rive est toujours verte quand on est d’un côté. Malheureusement, la logique dans laquelle on s’est inscrit dans la gestion publique, est une logique complètement jacobine centralisée, mais les autres n’ont pas besoin de ce que tu leur donnes. Ils ont leur pouvoir. On est complètement déstabilisé et il faut que le pays ait le courage de faire face à lui même. Nous avons un fond de savoir locale extraordinaire ».