La communauté internationale sous-estime la menace que représentent les jihadistes retranchés dans l’extrême nord du Mali aux mains des séparatistes touaregs. C’est ce qu’estime dans une interview à l’agence Reuters le Premier ministre Moussa Mara. Selon le Premier ministre, des jihadistes étaient dans les rangs des mouvements armés qui ont pris Kidal le mois dernier.
Pour Moussa Mara « la communauté internationale n’accorde pas suffisamment d’importance à la menace jihadiste de Kidal ». « En ce moment-même », confie-t-il « des jihadistes se trouvent à Kidal. Ils sont même arrivés avant moi » précise-t-il.
De leur côté les trois principaux mouvements séparatistes , le MNLA, le MAA et le HCUA, nient tout lien avec les islamistes, mais le Premier ministre est convaincu que ces derniers vont reprendre le dessus comme ils l’ont fait en 2012. Moussa Mara va même jusqu’à ironiser « pour les jihadistes, il y aura le MNLA au petit-déjeuner, le Mali au déjeuner et l’Occident au dîner » .
Moussa Mara redoute que la présence de jihadistes dans les rangs séparatistes « ne voue tout accord de paix à l’échec ». Le premier ministre pointe les effets pervers de l’ouverture démocratique au nord qui pourrait « élire un jihadiste à la tête de Kidal », une hypothèse qu’il refuse catégoriquement. Pour le premier ministre l’absence de délimitation claire entre mouvements islamistes et séparatistes, pose par ailleurs un problème d’envergure. « Ils ont les mêmes intérêts « dit-il « quand leur adversaire est l’armée malienne. C’est quand on les laisse face à eux mêmes que les divergences apparaissent », affirme-t-il.
Hier mardi les trois groupes armés, MNLA, MAA et HCUA, ont lancé un ultimatum aux autres groupes dissidents à les rejoindre dans la perspective des prochaines négociations. Pour certains analystes, « l’initiative vise à afficher une certaine unité, aux yeux de l’opinion. Mais elle n’ira pas loin, tant les intérêts de ces groupes sont divergents ». C’est l’analyse de Cheick Oumar Diallo, écrivain, spécialiste des questions du Nord joint par Issa Fakaba Sissoko :
« L’ultimatum des trois groupes armés, signé depuis Alger, est un appel à la branche dissidente du MAA qui est pro-gouvernementale et qui avait, à l’issue des combats du 21 mai dernier, engagé une série d’affrontements contre les troupes du MNLA et également de celles du MAA qui reste proche de la branche HCUA et MNLA.
Donc, c’est une forme de mise en garde qui vise à démontrer une sorte d’unité de ces trois principaux groupes et qui vise surtout à lancer un message d’engagement contre le terrorisme de la part de ces groupes là. Mais un engagement qui, somme toute, n’a pas de sens, puisse que nous connaissons tous les liens qui unissent ces trois groupes là et certaines unités jihadistes. Et je pense qu’aujourd’hui le message qu’ils veulent lancer c’est de tenter de montrer qu’ils contrôlent une zone, alors qu’ils ne la contrôlent pas ».