Les groupes armés de la Plateforme, qui occupent la ville d’Anéfis, dans le nord du pays, ont refusé hier de la quitter comme le demandait la médiation internationale pour, dit-elle, « apaiser la crise ». Une décision qui renforce les tensions sur le terrain. Dans sa déclaration, la Plateforme conditionne son retrait d’Anefis à la sécurisation de la ville par l’armée malienne.
Le Groupe d’auto-défense touareg Imghad et alliés Gatia, a pris Anéfis après trois jours de combats meurtriers du 15 au 17 août. Ces combats s’étaient déroulés « en violation de l’accord de paix pour le Mali conclu au printemps, et signé par le gouvernement malien et ses alliés, puis par les rebelles. Lundi, la médiation internationale pour la paix dans le nord du Mali avait appelé les groupes armés à revenir à leurs positions d’avant les combats.
Hier, les responsables de la Plateforme ont annoncé qu’ils refusaient catégoriquement de quitter sans condition la ville d’Anéfis. Dans une déclaration, la Plateforme avait, dans un premier temps, pourtant donné « son accord de principe de se retirer d’Anéfis ». Mais elle estimait « nécessaire, pour des raisons de sécurité des populations, de voir les Fama, accompagnées des forces internationales, s’y déployer sans délai ».
La situation « sur le terrain était tendue » mercredi, a déclaré une source militaire africaine au sein de la Minusma. « A Anéfis, les groupes armés de la Plate-forme ont renforcé leurs dispositif militaires. A Kidal, la rébellion renforce également son dispositif, apprend-on de sources locales.
La Plateforme maintient qu’elle est disposée à quitter Anefis, mais pose des conditions : le non retour de la CMA dans la localité, et la sécurisation des populations par l’armée malienne, appuyée les forces onusiennes.
Me Harouna Touré est le porte-parole de la Plateforme des mouvements armés. Il a été joint par Issa Fakaba Sissoko :
« D’après l’interprétation que nous avons faite du texte, et d’après les aveux mêmes de la médiation, c’est la CMA qui va revenir après notre départ. Et cela n’est pas souhaitable. Nous n’avons pas rejeté le plan, mais nous avons proposé une modalité. Nous étions prêts à sortir mais à la condition que les populations soient sécurisées par l’armée malienne, accompagnée, si nécessaire, par la Minusma. Ce point n’a pas été accepté par la médiation. Nous n’avons pas accepté aussi, qu’après notre départ que la CMA s’installe à Anefis pour ensuite terroriser les populations, les piller, surtout que les celles-ci ont manifesté leur joie et leur allégresse quand les éléments de la Plateforme ont repris Anefis. Donc, il y a un risque de vengeance ou de représailles sur ces populations. Visiblement, ce que nous disons à la médiation ne l’intéresse pas. Alors que ce que nous disons est conforme à l’esprit de l’accord. Nous lui avons fait savoir ce qu’elle ne veut pas entendre : c’est à dire que cette crise, si nous pouvons l’appeler ainsi, ne peut être résolue qu’au niveau d’un organe crée par l’accord et qu’on appelle la commission technique de sécurité ».
Les membres de la médiation n’ont pas souhaité réagir à la déclaration de la Plateforme. Selon le représentant de l’Union africaine, Pierre Buyoya, « la médiation se réfère au document de sortie de crise proposé aux parties » sans plus de commentaire.
Pour certains observateurs, les divergences autour d’Anefis constituent un blocage sérieux dans le processus. Mais la solution, disent-ils, réside dans la résolution 22-27 de l’ONU de juin dernier. Selon ces analystes, « l’Algérie a la clé du problème, et la visite annoncée du chef de l’Etat, peut contribuer à harmoniser les positions ».
Me Amadou Tiéoulé Diarra, est chargé de cours de cours à la Faculté des sciences juridiques et politiques de l’Université de Bamako. Il est joint par Issa Fakaba Sissoko :
« L’Algérie a la clé : c’est elle le problème et la solution. Même si l’armée malienne s’y déployait , elle est assujettie au respect du droit international des Droits de l’Homme. En droit, il n’y a pas de problème que l’armée soit déployée dans le contexte actuel. Si nous nous référons à la résolution 22-27 de l’ONU, il n’y a pas de raison que l’armée ne soit pas à Anefis, parce qui est dit très clairement c’est qu’il incombe aux autorités maliennes d’assurer la stabilité et la sécurité sur l’ensemble du territoire national, et qu’il importe que le pays prenne en main les initiatives en faveur de la paix et de la stabilité. C’est clair dans le document. Si le conflit inter-maliens s’arrange, l’ONU y gagne en crédibilité. Si elle parvient à régler ce problème, sa neutralité lui sera reconnue. Mais l’ONU peut être prise en otage par des puissances qui ont intérêt dans ces espaces là. Et je crois qu’aujourd’hui, c’est ce qui est train de se passer au Mali ».